Ce 15 octobre 2025, INFO83 reçoit Patrick Romagnoli, président du Tribunal de commerce de Toulon. Il nous éclaire sur la défaillance des entreprises en France et dans le Var. Ensemble, nous abordons les causes de cette hausse, les outils de prévention, et les modes alternatifs de règlement des différends (MARD). Un échange instructif et rassurant pour les chefs d’entreprise qui veulent comprendre et anticiper.
Une hausse des défaillances d’entreprises au niveau national
Au 15 octobre 2025, la France enregistre une hausse significative des défaillances d’entreprises. Selon les dernières données, elles progressent de +5 % sur un an. Les très petites entreprises (TPE) sont les plus touchées avec +9 %, suivies des PME de 10 à 15 salariés (+13 %).
Patrick Romagnoli rappelle que ces chiffres concernent les sauvegardes, redressements et liquidations judiciaires réunis.
Malgré la conjoncture tendue, une note positive se dégage : il y a plus de redressements que de liquidations, signe que la prévention commence à porter ses fruits.
Toulon, une exception locale dans un contexte national difficile
À Toulon, la situation apparaît plus stable. Le nombre de défaillances d’entreprises reste élevé, mais légèrement inférieur à celui de 2024. Par rapport à 2019, on note une hausse d’environ +16 %.
Le président Romagnoli explique cette résistance par plusieurs facteurs : un effet retard économique propre au Var, un impact positif du tourisme et une activité saisonnière qui soutient encore la trésorerie locale. Mais il prévient : le dernier trimestre de 2025 pourrait s’avérer plus difficile pour de nombreuses structures fragilisées.
Le rôle du PGE dans les difficultés actuelles
Le Prêt Garanti par l’État (PGE), mis en place pendant la crise sanitaire, a d’abord permis de sauver de nombreuses entreprises.
Aujourd’hui, certaines peinent à rembourser ces emprunts, faute de marges suffisantes. Les coûts augmentent, la demande ralentit et les trésoreries s’épuisent.
Selon Patrick Romagnoli, deux problèmes majeurs émergent : la diminution des marges et la difficulté à se réendetter. Ces tensions financières contribuent directement à la hausse des défaillances d’entreprises observées en 2025.
Que signifie “défaillance d’entreprise” ?
Beaucoup de dirigeants ignorent la distinction entre les différents types de défaillance d’entreprise.
Le président Romagnoli rappelle qu’il s’agit de trois procédures : la sauvegarde, le redressement judiciaire et la liquidation judiciaire.
- La sauvegarde, peu utilisée, s’adresse aux sociétés en difficulté mais non encore en cessation de paiement.
- Le redressement vise à réorganiser l’entreprise pour poursuivre l’activité.
- La liquidation intervient en dernier recours, quand la survie n’est plus possible.
Cette clarification aide les chefs d’entreprise à mieux comprendre leurs options avant d’agir.
Les signes avant-coureurs d’une défaillance d’entreprise
Une défaillance ne survient jamais du jour au lendemain.
Les premiers signaux sont souvent visibles : retards de paiement, baisse du chiffre d’affaires, tensions de trésorerie et endettement croissant.
Patrick Romagnoli insiste : « Le pire réflexe est de rester seul face à ses difficultés. »
Dès les premiers signes, il faut consulter les services de prévention du Tribunal de commerce. Cette démarche, confidentielle, peut éviter la faillite et conduire à une solution amiable ou à un plan de redressement adapté.

La prévention : une solution trop peu utilisée
Le mot d’ordre de Patrick Romagnoli est clair : prévenir plutôt que guérir.
Le Tribunal de commerce de Toulon propose des rendez-vous de prévention, où les juges écoutent, conseillent et orientent les dirigeants.
Pourtant, ces dispositifs restent sous-utilisés. Depuis janvier 2025, seulement une vingtaine de préventions ont été engagées, pour plus de 400 ouvertures de procédures collectives.
La peur du tribunal et la méconnaissance freinent encore les dirigeants. Pourtant, plusieurs entreprises locales, comme le Domaine de la Castille, ont pu être sauvées grâce à une procédure anticipée.
Les défaillances d’entreprises sont un enjeu majeur pour l’économie française. Comprendre leurs causes, anticiper leurs effets et connaître les solutions locales proposées par le Tribunal de commerce de Toulon est essentiel pour tout dirigeant. La prévention, le dialogue et les modes amiables de règlement sont les piliers d’une économie résiliente et durable.
Le MARD, un nouvel outil pour résoudre les conflits
Depuis janvier 2025, le Tribunal de commerce de Toulon expérimente un outil innovant : le Mode Alternatif de Règlement des Différends (MARD).
Ce dispositif permet de régler les litiges à l’amiable, avant qu’ils ne deviennent des contentieux longs et coûteux.
Une audience de règlement amiable réunit les parties autour d’une table, avec l’aide d’un juge médiateur.
Depuis une récente loi, le tribunal peut même imposer cette rencontre.
Cette méthode allège les tribunaux, réduit les coûts juridiques et renforce la confiance entre acteurs économiques.

Le Tribunal de commerce : un allié, pas un juge à craindre
Contrairement à une idée reçue, le Tribunal de commerce n’est pas une instance punitive.
« Le tribunal est un allié des entreprises, pas un ennemi », insiste Patrick Romagnoli.
Son objectif est de préserver l’activité économique, d’éviter les faillites et d’aider les entrepreneurs à se relever.
De nombreuses procédures se concluent par des accords, des plans de redressement ou des solutions amiables.
Le dialogue et la transparence restent les meilleurs leviers pour surmonter une défaillance d’entreprise sans perdre son activité.

Une feuille de route ambitieuse pour la fin de 2025
Le Tribunal de commerce de Toulon prépare une feuille de route ambitieuse pour la fin de l’année 2025 et 2026.
Les priorités sont claires :
- Renforcer la prévention, en réunissant les syndicats professionnels et en multipliant les actions de sensibilisation.
- Développer les audiences amiables dans les litiges commerciaux.
- Intégrer l’intelligence artificielle pour fluidifier la gestion des dossiers.
- Former les juges consulaires, grâce à un nouveau diplôme universitaire en partenariat avec l’Université de Toulon.
Ces actions visent à rendre la justice commerciale plus moderne, efficace et proche des entrepreneurs.
Conclusion : anticiper pour mieux rebondir
Face à la montée des défaillances d’entreprises, le message est clair : anticiper reste la clé.
Les outils existent : prévention, médiation, accompagnement juridique et dispositifs amiables.
Patrick Romagnoli invite les dirigeants à agir tôt et à faire confiance au Tribunal de commerce.
La réussite du Domaine de la Castille en est la preuve : une entreprise peut se redresser et repartir plus forte.
Dans un contexte économique incertain, la solidarité entrepreneuriale et la réactivité sont les meilleures armes contre la défaillance.
Cinq Questions Réponses sur la résolution amiable des différends
Sources : Ministère de la Justice – Conseil départemental d’accès au droit du Finistère
1 – Conciliateur de justice
2 – Médiateur de la ville
3 – Délégué du Défenseur des droits
4 – Médiateur
5 – MARD – Les modes alternatifs au règlement des différends
1 – La conciliation : qu’est-ce que c’est ?
Le recours à la conciliation de justice est un moyen simple, rapide et gratuit de venir à bout d’un conflit en obtenant un accord amiable sans procès.
La conciliation est un mode de règlement amiable de litiges de la vie quotidienne.
Elle est obligatoire pour les litiges de moins de 4 000 €.
Elle peut intervenir en dehors de tout procès, ou devant un juge ou être déléguée à un conciliateur de justice.
Conflits concernés et champ d’action
- relations entre bailleurs et locataires
- litiges entre commerçants
- litiges et troubles du voisinage
- litiges de la consommation
- litiges entre personnes
- problèmes de copropriété
Comment saisir le conciliateur ?
Le conciliateur de justice est saisi de la propre initiative d’une des parties : une simple prise de rendez-vous en mairie, en tribunal ou en recherchant un lieu de permanence sur le site conciliateurs.fr.
Si un compromis est trouvé, le conciliateur de justice rédige un constat d’accord qui peut être homologué par le juge afin de lui donner force de jugement.
2 – Quelle est la mission qu’un médiateur de ville ?
Vous êtes une personne physique ou morale ayant recours aux services publics municipaux en tant qu’usager ou administré ; vous rencontrez un conflit avec ces services municipaux :
le médiateur de la ville a pour mission de vous aider à trouver une résolution amiable à ce litige.
Ni juge ni arbitre, indépendant et neutre, le Médiateur Municipal est à la recherche de solutions équitables.
Conflits concernés et champ d’action
- différend avec l’administration communale
- litige avec un organisme investi d’une mission de service public
Exclusions
- commissions d’attribution (demande de logements, places en crèches, d’aides financières)
- affectations scolaires
- procès-verbaux ou décisions de justice
- conflits d’ordre hiérarchique ou disciplinaires entre l’administration et ses agents
- litiges entre particuliers
La Saisine du Médiateur
La saisine du médiateur est libre, sous réserve que le demandeur ait, au préalable, effectué toutes les démarches nécessaires auprès de l’administration pour lui demander une explication, une révision ou une annulation de la décision qui lui fait grief.
3 – Qu’est-ce qu’un délégué du Défenseur des droits ?
Présents sur l’ensemble du territoire, les délégués du Défenseur des droits vous accueillent, écoutent et orientent dans vos démarches.
Bénévoles, les délégués sont formés pour recevoir, gratuitement, toute personne qui sollicite de l’aide pour faire valoir ses droits et libertés individuelles dans le cadre de 5 domaines de compétences déterminés par la loi :
- défense des droits des usagers des services publics
- défense et promotion des droits de l’enfant
- respect de la déontologie par les professionnels de la sécurité
- lutte contre les discriminations et promotion de l’égalité
- orientation et protection des lanceurs d’alerte
Saisine du défenseur des droits
Vous pouvez saisir le Défenseur des droits par courrier gratuit sans affranchissement, par l’intermédiaire des délégués ou en ligne sur www.defenseurdesdroits.fr
4 – Quel est l’objectif de la médiation ?
L’objectif de la médiation est d’amener les parties à un accord grâce à l’intervention d’un tiers neutre et objectif, le médiateur.
Il peut être désigné par le juge, dans le cadre d’une procédure.
Quels conflits sont concernés et quel est le champ d’action ?
- La médiation civile : le juge saisi d’un litige d’ordre civil (problèmes de loyers, de voisinage, d’autorité parentale…) peut proposer une médiation.
- La médiation pénale : dans le cadre de certaines infractions de faible gravité, le Procureur peut proposer une médiation afin d’assurer la réparation du dommage causé à la victime.
- La médiation familiale : négociation permettant de prendre en compte de manière les besoins de chacun (enfants, grands-parents, parents, héritiers…).
Elle a pour finalité d’apaiser le conflit et de préserver les relations au sein de la famille. - La médiation de l’énergie : en cas de litiges avec les entreprises du secteur de l’énergie, le médiateur de l’énergie peut intervenir. Il informe les consommateurs et défend leurs droits.
- La médiation de la consommation : en cas de litige entre un professionnel et un particulier, le médiateur de la consommation peut gratuitement prendre en charge la médiation.
- La médiation conventionnelle : permet de régler à l’amiable un différend entre le salarié et l’employeur afin d’éviter un recours au conseil de prud’hommes.
5 – Qu’est-ce que le mard ? M.A.R.D — les Modes Alternatifs au Règlement des Différends
Avant de saisir la justice, vous pouvez tenter de trouver un accord amiable à votre litige par le biais des modes alternatifs de règlement des différends (MARD).
L’objectif est d’aboutir rapidement à une solution plus acceptable, sans faire appel à un juge.
Depuis la réforme de la Justice du 21e siècle et, notamment la résolution amiable des différends, il vous est demandé de justifier du recours ou de la tentative de recours à ces MARD avant de saisir le juge.
Les réseaux de conciliations : Quels sont-ils ? Qui contacter ? Pour quelle nature de litige ? Conciliateurs de justice, médiateurs, délégués du Défenseur des droits, faites appel à ces interlocuteurs privilégiés.
Renseignez-vous auprès du Tribunal de commerce de Toulon.
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